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GAVROCHE – LECTEURS : Mais qui était vraiment Jean-Marie Le Pen ?

Date de publication : 17/01/2025
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De nombreux lecteurs ont réagi au dernier éditorial de Richard Werly consacré à la disparition de Jean-Marie Le Pen. Nous publions ici l’une de ces réactions

 

Il faut contextualiser la personnalité de J.M. Le Pen. Né en 1928, il « épouse », lorsqu’il a une dizaine d’année, l’opinion majoritaire de l’époque. Admirateur de Pétain comme bon nombre de Français il ne cessera pas de le louer et de l’opposer à De Gaulle dont il sera l’adversaire. Son adversaire résolu lorsque De Gaulle s’engage après 1958 dans l’ »abandon » de la France coloniale pour laquelle il a combattu en Indochine d’abord, en Algérie ensuite. Une « trahison » selon les partisans de l’Algérie française et de l’OAS qu’il soutiendra.

 

Son existence politique commence en 1956 comme député mais c’est J.L. Tixier-Vignancours qui sera le candidat à l’élection présidentielle de 1965. Sa candidature aurait-elle changé le cours de l’évolution politique ? Sans doute prématurée. Il faudra attendre 1972 pour que le parti de J.M. le Pen, le « Front National » advienne à l’existence. Ses résultats électoraux vont longtemps stagner dans un état squelettique, le mode de scrutin législatif représentant un obstacle insurmontable. Son existence est d’abord municipale (Dreux en 1983) puis plus tard européenne avec l’élection du parlement au suffrage universel avec un scrutin proportionnel. Mais c’est avec son « alter ego », F. Mitterrand, un « couple diabolique »que l’ascension lepeniste s’opère par une alchimie qui va caractériser la vie politique française jusqu’à aujourd’hui.

 

En 1981 F. Mitterrand, double de J.M. Le Pen, une résurrection des Dioscures, mais contrairement à lui, non décoré de l’emblème vichyste suprême, mais partageant avec lui la mythologie et le culte de l’extrême droite distillé à la « cagoule », bu le lait de Maurras et de Drumond, défenseur hors pair de la France coloniale dans ses attributions ministérielles multiples (intérieur, justice, information), opposant farouche à De Gaulle (le « coup d’État permanent »), va découvrir son hochet dans la personne de J.M. Le Pen. « Le vieux chat et la jeune souris »…

 

La conversion opportuniste à l’anti-capitalisme et au socialisme de F. Mitterand, en 1972, l’échec de la phase « enchantée » de 81-83, les odes à l’Union Européenne et à la mondialisation bientôt qualifiée d’heureuse, l’ouverture du marché à tous les vents et la financiarisation de l’économie, les désindustrialisations et les « plans sociaux » qui s’ensuivent, et surtout la « rigueur » hérissent l’opinion publique et d’abord celle qui a voté pour Mitterrand.

 

En bon tacticien cynique, Mitterrand va imaginer un « artéfact » qu’il va, par l’entremise de son ministre de l’information, installer sur les antennes télévisées publiques. François -Henri de Virieu sera le prêtre de cette intronisation politique du Front national. C’est la fameuse émission l’ »heure de vérité » de février 1984 qui à la fois campe un Le Pen diabolisé et le lance sur l’orbite politique nationale. C’est l’amorce de la fin de la « gauche sociale » et sa mutation en « gauche sociétale » que va théoriser la fondation « Terra Nova ». (sa fameuse note du 10 mai 2011 : « Gauche: quelle majorité électorale pour 2012 ? »). Les classes populaires vont de plus en plus voter pour le « Front national ». Un mouvement que va accélérer la succession de la fille au père. L’artefact va alors prend la figure de « Frankenstein » au fil du temps.

 

A partir de là machine à instrumentaliser, « machine infernale », actionnée d’un côté comme de l’autre ne va pas cesser de croitre et d’embellir. La perspective d’élections législatives désastreuses pour le pouvoir trouva une parade : la diabolisation du Front National et surtout de son dirigeant. Son personnage fût ciselé par ses opposants des deux bords, à gauche et à droite, et la menace d’un retour au fascisme pour les uns, au nazisme pour les autres, figea et stérilisa tout débat et même l’empêcha. Le coin enfoncé pouvait alors diviser la droite encore culpabilisée par son passé vichyste. Cette situation dura, perdura garantissant à l’ »établissement » (expression du « Front national ») la majorité parlementaire soit absolue soit, en cas de cohabitation, partagée.

 

Le scénario a dominé la vie politique française jusqu’à aujourd’hui, les dernières élections législatives en sont un dernier avatar et le « front républicain » un énième instrument. Le scénario a surtout empêché de voir et de penser la société française et certains des problèmes auxquels elle était et est toujours confrontée. Il a empêché les partis politiques et notamment à gauche de poser les bonnes questions.
Parmi les questions, celles de l’immigration et des politiques migratoires souhaitables et nécessaires n’ont jamais pu être posées, marquées du sceau du racisme et de l’infamie parce que considérées comme essentielles par le « Front National ».

 

Nous en sommes toujours là contrairement à l’évolution qui caractérise les orientations prises dans certains pays européens comme de Danemark et sous la direction de partis socialistes. Mais par un curieux télescopage des idées, n’avons nous pas constaté que lors de l’annonce du décès de J.M.Le Pen, des foules dansant sur le cadavre encore chaud, brandissaient à Paris, à Lyon, à Marseille, des drapeaux autres que nationaux ne dissimulant même plus leur antisémitisme… pardon, leur antisionisme… Ces bobos urbains, s’imaginant en guerriers exterminateurs, munis de leurs épées verbales, sabraient le champagne après avoir terrassé le dragon. A leur corps défendant et dans un » tête à queue » grotesque ils bouclèrent la boucle dans une sarabande mortifère dont ils furent les « idiots utiles ».

 

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