GAVROCHE HEBDO – ÉDITORIAL : Doit-on dissoudre la société thaïlandaise ?
La monarchie Thaïlandaise rassemble. Elle est l’un des piliers du pays. Son épicentre. Mais elle divise aussi. Cette réalité est celle que les pétitionnaires désireux de voir la justice du royaume dissoudre maintenant le parti Move Forward ne veulent pas admettre. Or ils ont tort. Interdire cette formation politique victorieuse des dernières législatives ne fera que radicaliser la frange de l’opinion thaïlandaise demandeuse de réformes jusqu’au au sommet de l’État. Il s’agirait en effet, ni plus ni moins, d’un vol des résultats électoraux. Impossible ensuite, pour les partisans du statu-quo monarchique et du délit de lèse-majesté qu’ils représentent le peuple dans sa diversité.
Considérer, comme viennent de le faire les juges constitutionnels thaïlandais, que le parti Move Forward s’est rendu coupable d’une violation de l’article 112 du code pénal, ne signifie pas que ce mouvement, son programme et sa plate forme électorale sont à jeter aux oubliettes de la démocratie. L’intérêt du pays est que cette formation propose des amendements à son programme et à ses promesses de campagne pour sortir de cette impasse juridique. Le royaume a besoin d’avoir, dans ces années de convulsion géopolitiques, un gouvernement à la fois stable et représentatif, respectueux des traditions et de la loi, mais ancré dans la modernité.
Éviter un engrenage juridique aveugle
Dissoudre le parti Move Forward ne changera donc pas la donne. Que l’on soit ou non favorable à l’article 112 – régulièrement dénoncé par les organisations de défense des droits de l’homme – l’époque à laquelle nous vivons exige de regarder les réalités en face. Les 44 députés du Move Forward et leurs électeurs sont aussi thaïlandais que les partisans de la monarchie et du délit de lèse majesté. Qui, au sein de la coalition actuellement au pouvoir, saura se montrer à la hauteur et éviter un engrenage juridique aussi aveugle que dangereux ?