Le gouvernement indonésien et la Chambre des représentants ont discuté d’un système de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) multi-tarif dans le cadre d’une proposition de révision de la législation fiscale. Les recherches ont toujours montré que, les femmes ayant des habitudes de consommation différentes en raison des rôles sociaux sexués, elles sont souvent désavantagées par la structure des TVA par rapport aux hommes.
En théorie, les avantages d’une TVA multi-tarifaire sont multiples. Le nombre de biens et services auxquels s’applique le taux de TVA actuel de 10 % en Indonésie, et son ratio TVA/PIB d’environ 3,6 %, sont relativement faibles par rapport à d’autres pays, ce qui laisse entrevoir un potentiel inexploité. En taxant davantage de formes de consommation, le gouvernement pourrait élargir l’assiette fiscale, combler les lacunes et augmenter les recettes fiscales. En d’autres termes, le nouveau régime a le potentiel d’accroître l’efficacité économique et les recettes de l’État.
Problèmes d’équité
D’un autre côté, la TVA soulève inévitablement des problèmes d’équité. À l’instar d’autres impôts indirects, la TVA a généralement des effets régressifs : étant donné qu’elle s’applique de la même manière à tous, indépendamment du revenu, les personnes appartenant à la tranche de revenus la plus faible consacreront une plus grande partie de leur salaire à la consommation.
Le genre semble aggraver ces effets régressifs. Comme les femmes ont tendance à consacrer une plus grande partie de leurs revenus aux besoins de base et aux biens essentiels de la famille, elles risquent elles aussi d’être touchées de manière disproportionnée si les exonérations de TVA ne sont pas appliquées de manière appropriée. Des études menées dans des pays aussi éloignés que le Nicaragua et l’Afrique du Sud ont révélé que les ménages dirigés par une femme – en particulier ceux qui ont des enfants et dont les revenus sont faibles – sont les plus vulnérables aux effets distributifs de la TVA.
Rôle domestique et reproductif
En outre, des normes sociales bien ancrées ont confiné les femmes dans des rôles domestiques et reproductifs, les désignant comme les principaux pourvoyeurs de soins et les femmes au foyer. Les données de l’OCDE confirment que, dans le monde entier, les femmes accomplissent jusqu’à dix fois plus de tâches non rémunérées que les hommes. La double charge de travail et la répartition inégale des tâches domestiques entraînent une baisse des revenus des femmes, ce qui limite leur capacité d’action économique. Le Bureau central des statistiques d’Indonésie a révélé en février 2020 que les femmes gagnent 23 % de moins que les hommes. Pour cette seule raison, les augmentations de la fiscalité indirecte, par opposition aux impôts directs plus progressifs, auront un impact disproportionné sur les femmes.
Pour atténuer les effets disproportionnés de la réforme fiscale sur les pauvres, le gouvernement indonésien a déclaré, dans son cadre macroéconomique et ses principes de politique budgétaire pour 2022, que le nouveau régime de TVA sera rendu plus équitable et moins régressif en appliquant des tarifs plus bas sur les besoins de base et en recyclant les nouvelles recettes dans des programmes sociaux et des transferts aux pauvres. Mais étant donné l’absence d’intégration de la dimension de genre dans la politique fiscale, les besoins spécifiques des femmes risquent d’être négligés dans l’analyse fiscale et la formulation des politiques.
Remerciements à Michel Prévot