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INDONÉSIE – ÉCONOMIE : Sam Rainsy parle du miracle Indonésien, mais il n’existe pas !

Date de publication : 17/09/2024
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Paul Di Rosa est un lecteur fidèle de Gavroche, ancien expatrié en Indonésie. Il a pris connaissance de l’analyse récente de Sam Rainsy, très favorable à cet immense archipel. Crédible ? Pas tout à fait selon ce fin connaisseur du pays…



Cher Sam Rainsy

 

C’est avec grand plaisir et intérêt que j’ai lu votre tribune dans Gavroche consacrée à l’Indonésie, que l’on peut consulter ici.

 

Mais vous me semblez oublier l’essentiel :



Népotisme et Corruption tels ont été les principaux moteurs de la croissance indonésienne pendant toute l’ère Soeharto (1967-1998).

 

Alors que se rapproche l’intronisation du nouveau Président élu, il est plus que nécessaire de se poser la question du risque de retour de ces pratiques délictueuses et néfastes à la bonne santé économique du pays.

 

Certes l’Indonésie, archipel continent aux vastes ressources considérées longtemps comme inépuisables, continue à bénéficier des louanges et du soutien de la Banque Mondiale qui quelques mois avant la chute de l’ex Président dictateur Soeharto et l’effondrement de la rupiah de 2.000 à 16.000 contre 1 US$ n’avait rien vu venir.

 

26 années se sont écoulées depuis la chute brutale du dictateur, qui se croyant tout permis, réélu triomphalement en Mars 1998 avec 78% des voix faisait entrer sa fille aînée Tutut et son partenaire de Golf Bob Hassan dans son gouvernement, appointant son protégé de toujours l’Ir,Prof,Dr B.J.Habibie Vice Président… Les marchés ne l’ont pas supporté, rejoints par les étudiants et la population après une féroce répression orchestrée par le gendre du dictateur.

 

C’est le même gendre, Prabowo Subianto, ex patron des Kopassus, les redoutées forces spéciales du pays, divorcé depuis d’une des filles du dictateur qui succédera en Octobre prochain au Président Joko Widodo appelé familièrement Jokowi.

 

Ancien marchand de meubles, devenu grâce au parti de Megawati Soekarnoputri, fille du leader charismatique de l’indépendance, chassé du pouvoir par Soeharto en 1965, que Jokowi membre du parti en 2004 accède en 2005 à la mairie de Surakarta. Sa bonne gestion et son allant au sein du PDI-P l’amèneront à troquer l’écharpe de maire de Surakarta contre celle de gouverneur de Jakarta en 2012. Puis, toujours grâce aux mêmes qualités à la présidence de la République en 2014 où il sera réélu en 2019 ne pouvant se présenter pour un troisième mandat.

 

Avide d’harmonie, il fera de Prabowo, son opposant a ses deux campagnes présidentielles, son ministre de La Défense après sa réélection… Allant jusqu’à faire changer la loi pour pouvoir faire élire l’un de ses fils vice-président du futur Président.

 


Le marchand de meubles juste et intègre des années 2000 accédant aux plus hautes fonctions de la république indonésienne grâce à son adhésion au PDI-P est entré en froid avec la matriarque Megawati et est accusé de népotisme par de nombreux indonésiens pour avoir fait accéder plusieurs membres de sa famille a de hautes fonctions.

 

Selon la typologie de classement de la Banque Mondiale, l’Indonesie fait partie des pays à revenus intermédiaires passant en 2024 de revenu intermédiaire inférieur à supérieur, son produit intérieur brut par habitant passant à 5.000 $, cette notion ne tenant en rien compte des immenses disparités entre une population de 280 millions d’habitants dont 40% des enfants meurent avant l’âge de 5 ans selon l’ONG Humanium, et une oligarchie proche du pouvoir politique.

 

Membre influent de cette oligarchie le frère et principal support financier du président élu de l’Indonésie Hashim Djojohadikusumo détendeur d’une ardoise fiscale de plus de 130 millions de francs suisses, vient de voir le 3 Septembre dernier la Cour suprême helvétique autoriser le fisc genevois à confisquer les comptes bancaires de ses trois enfants, neveux du président élu de l’Indonésie Prabowo Subianto dans le cadre d’une procédure visant leur père, le magnat Hashim Djojohadikusumo.

 

Les mêmes causes amenant les mêmes effets, Népotisme et Corruption ne sont pas prêts de disparaître et que toutes les bonnes résolutions et principes des grandes institutions internationales (ONU, WB,ADB,…) ne pourront rien, comme en 1998 à la chute de Soeharto, pour lutter contre ces deux fléaux.

 

Certains projets du futur président ne sont pas sans rappeler de vieilles casseroles de l’ère Soeharto ayant abouti à une dette de plus de 140 Milliards USD en 1998 et l’intervention du FMI.

 

Quand Prabowo propose pendant la campagne de distribuer au moins un repas par jour à tous les enfants du pays grâce au lancement d’un ambitieux projet de fermes laitières et l’importation de 1.5 million de vaches laitières d’Australie, de Nouvelle Zélande et des USA, il oublie l’échec d’un programme équivalent des années Soeharto ou 100.000 vaches importées du Wisconsin (USA) ont péri faute d’accompagnement vétérinaire… Il ferait mieux d’appeler a contribution son grand voisin Indien, plus grand consommateur mondial de produits laitiers, avec plus de 300 millions de vaches laitières, une culture commune à Java et une réussite sans équivalent des coopératives laitières sous l’impulsion du docteur Verghese Kurien et son programme de Révolution Blanche, l’Inde est passée d’un pays déficitaire en lait dans les années 1950 et 1960 à celui qui produit le plus de lait au monde.L’industrie laitière de l’Inde est depuis lors devenue la principale source de revenus pour de nombreux ménages ruraux. C’est l’un des plus grands employeurs, employant plus de 80 millions de personnes impliquées dans la production, la transformation, la vente et la commercialisation du lait et des produits laitiers. Il est vrai que les coopératives indiennes seraient moins enclines a distribuer des commissions que certaines sociétés occidentales…

 

Alors que feu l’Ir, Prof,Dr B.J.Habibie,  Président éphémère de la République Indonésienne pendant un an seulement (1998-1999) avait doté l’Indonésie d’un imposant complexe militaro-industriel, injectant près de 20 Milliards USD dans des projets démesurés a très faible rentabilité (PT PAL, I.P.T.N, PT.PINDAD, LEN, PUSPIPTEK, PT INTI, PT DAHANA,…) les équipements des forces armées du pays ont peu bénéficié des promesses du fougueux défunt Ministre de la Recherche et des Technologies…

 

C’est la principale raison de la fringale d’investissements militaires de ces dernières années, où sous la coupe du Ministre de la Défense du dernier mandat du Président Jokowi, qui le 20 Octobre prochain sera intronisé 8eme Président de la jeune République d’Indonésie, le budget des armées a été augmenté de plus de 20% avec un programme d’acquisition monumental d’équipements militaires de haute technologie : 24 F15EX (USA), 42 Rafale et 2 sous-marins Scorpene (France), frégates  (Danemark), Tanks Tigre (Turquie). En Juin 2021 l’Indonésie a dévoilé un plan visant à dépenser 125 milliards USD d’équipements militaires jusqu’au milieu des années 2040…

 

Certes la zone Asie-Pacifique est devenue du fait de la confrontation latente entre la Chine et les USA et ses alliés (AUKUS) une zone a haut risque de conflit, mais l’Indonésie qui depuis l’ère Soekarno développe une diplomatie de non alignement ne connait pas d’ennemi potentiel a ses vastes frontières archipelagiques, hors l’incursion de bateaux de pêche Chinois et autres prédateurs.

 

Ces centaines de milliards d’investissements auraient pu trouver meilleur usage au service des besoins essentiels d’une population et d’une classe moyenne affectées par le ralentissement de l’économie.

 

Le futur Président a décidé de financer ses promesses de campagne en augmentant le ratio dette/PIB de 2 points de pourcentage par an, ce qui pourrait atteindre 50% d’ici la fin de son mandat (2024-2029). En réponse à cette politique budgétaire sans précédent,Morgan Stanley a abaissé son évaluation des actions indonésiennes à « sous pondérées », prévoyant une incertitude économique à court terme.

 

L’an dernier, l’Indonésie a généré un produit intérieur brut par habitant de 5.000 USD. Mais l’exécutif dirigé par le président Joko « Jokowi » Widodo – et bientôt par son numéro deux et successeur, Prabowo Subianto – promet, dans une grande campagne nationale baptisée « Une Indonésie en or », de doubler ce montant d’ici à 2035, et même de le faire passer à 25.000 dollars par habitant d’ici à 2045. « L’objectif est d’échapper au piège du revenu intermédiaire et de réussir à projeter 80 % de la population dans la classe moyenne », expliquait récemment Muhammad Hadianto, le responsable des coopérations multilatérales au ministère indonésien de l’Économie.

 

Pour tenir ces objectifs,  Jakarta a besoin de générer une croissance annuelle d’au moins 6 % et d’enclencher plusieurs grandes reformes économiques et sociales.

 

Objectifs difficiles à atteindre dans un environnement économique mondial en faible croissance et un GDP autour de 5% en période de forte consommation du fait du Ramadan et alors que l’Institut de recherche économique et sociale (LPEM) de la Faculté d’économie et de commerce de l’Université d’Indonésie (FEB UI) a signalé un déclin inquiétant de la classe moyenne indonésienne, attribué à la diminution du pouvoir d’achat.

 

Selon les Perspectives économiques indonésiennes 2024 du LPEM FEB UI pour le troisième trimestre 2024, la classe moyenne a diminué de plus de 8,5 millions d’individus depuis 2018, laissant environ 52 millions de personnes, soit 18,8 % de la population, dans cette catégorie en 2023.

 

En conclusion, faisant un tri objectif entre belles promesses de campagne et dure réalité, nous ne pouvons qu’appeler nos lecteurs a la plus grande prudence… Népotisme et Corruption largement enracinés dans les mentalités et les usages conditionnerons encore longtemps la destinée de ce grand et beau pays.

 

Cher Sam Rainsy, prenez garde à une lecture trop rapide des résultats économiques de l’archipel !

 


Documents liés à cet article :

https://en.wikipedia.org/wiki/Indonesian_Bank_Restructuring_Agency

Tribunal fédéral. – Arrêt du 10 juillet 2024 (Sitie Indrawati Djojohadikusumo)

Tribunal fédéral. – Arrêt du 10 juillet 2024 (Aryo Puspito Setiaki Djojohadikusumo)

Tribunal fédéral. – Arrêt du 10 juillet 2024 (Rahayu Saraswati Djojohadikusumo)

Chambre civile de la Cour de justice de Genève – Arrêt du 2 février 2023

http://www.thejakartapost.com/opinion/2024/06/26/analysis-morgan-stanley-downgrades-ri-stocks-over-prabowos-fiscal-policies.html

https://www.mordorintelligence.com/fr/industry-reports/indonesia-defense-market

https://www.asia-pacific-solidarity.net/news/2024-08-31/wealth-illusion-fading-mirage-of-indonesias-middle-class.html

 

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