Nous reproduisons ici un extrait d’une note économique du Crédit Agricole
L’Indonésie et la Nouvelle-Calédonie : des ambitions similaires pour des résultats antinomiques
L’Indonésie porte aujourd’hui la moitié de la production mondiale de nickel. L’essor de cette filière résulte d’un choix politique ; l’exportation du minerai brut y est totalement interdite depuis janvier 2020, succédant à des interdictions partielles depuis 2014. Galvanisée par des investissements massifs d’entreprises principalement chinoises, soucieuses de développer une chaîne de valeur robuste et à bas coûts aux portes de l’Empire du Milieu, la production indonésienne a quadruplé en dix ans. Corolaire de cette expansion rapide, le surplus de métal disponible contribue à entraver les cours du nickel, mettant les marges des producteurs étrangers sous pression. Ce succès de l’intégration verticale de la chaîne de valeur repose sur quatre piliers principaux : une volonté politique forte, un coût de l’énergie avantageux, supporté par des centrales électriques alimentées en charbon local, une main-d’œuvre abordable ainsi qu’une excellence opérationnelle, permettant des cadences de production élevées.
C’est justement sur ces trois derniers axes que le raffinage du nickel calédonien pèche.
Malgré l’installation de centrales captives par SLN (fuel) et KNS (charbon), le prix de l’électricité pour les sites industriels calédoniens oscille entre le double et le triple de son équivalent métropolitain, et représente 40% des coûts fixes et variables des sites de Doniambo et Koniambo. Cet écart de prix est comparable à celui observé avec l’Indonésie, premier concurrent de l’île. Rappelons également que l’activité de ces trois acteurs représente environ 70% de la consommation totale d’électricité locale.
Sur le front opérationnel, Prony Resources et KNS n’auront jamais réussi à produire à pleine capacité depuis le démarrage de la production en 2010 et 2013, affichant un taux de production moyen en deçà de 50% de leur capacité nominale et de fait loin de leur seuil de rentabilité.
La crise ajoutant à la crise, les émeutes de mai dernier auront également affecté la productivité de ces sites, forçant la SLN à réduire sa production au minimum à défaut d’accès au minerai, quand Prony Resources indiquait fin août que son usine était toujours à l’arrêt, faute d’accès à l’eau brute et à l’électricité. Début septembre, les déficits de production de minerais et de nickel raffiné étaient déjà de plus de 40% et 30% respectivement par rapport à 2023. En outre, le ralentissement de la demande mondiale d’acier, unique consommateur du ferronickel calédonien, et un possible retour du phénomène météorologique de La Niña en fin d’année, responsable de pluies diluviennes affectant les sites miniers du Pacifique, viennent conclure une annus horribilis pour la filière.
Retrouvez l’intégralité de la note ici.
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