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Chez les ermites bouddhistes

Date de publication : 27/03/2020
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Luc Mauger est docteur en anthropologie, maître en sociologie et en sciences des religions. Il a passé un an et demi en Thaïlande. Ordonné moine (bhikku) après avoir été « phakhao » (vêtu de blanc, dans un monastère), il est allé à la rencontre des moines, ceux qu’on appelle « phra yu ong diao » (moines qui résident seuls), qui quittent la vie ordinaire pour méditer à l’écart, dans un lieu isolé. L’auteur a partagé leur vie quelques jours dans les coins les plus reculés, a observé leur emploi du temps et a dressé dix portraits saisissants de ces ermites bouddhistes qui, pour la plupart d’entre eux, ont accepté de se confier.

 

Tous les moines bouddhistes contemporains rencontrés et présentés dans le livre font partie de la communauté monastique de la tradition Theravāda, doctrine considérée comme étant strictement conforme à l’enseignement du Bouddha historique.

 

Ces dix moines ermites présentés, on les suit tout au long de leur journée, dans leur emploi du temps à peu près semblable : lever très tôt, entre 3h et 5h ; méditation et office du matin ; la tournée des offrandes – plus souvent pour se sustenter que par plaisir – ; un seul repas après la tournée ; l’incontournable balayage des lieux et des environs ; les marches méditatives ; un en-cas vers 16h, puis vers 18h la douche et l’office du soir et enfin méditation et coucher.

 

Qu’ils vivent dans un minuscule logis en pierre, une hutte en forêt, une vaste grotte ou un bungalow construit par les villageois, ces ermites recherchent du calme et de la solitude. La nature et le silence. Certains ont été soldats, ont été mariés, ont des enfants, mais ils ont décidé de vivre en paix. En fait, ils semblent rechercher, pour certains, comme le souligne l’auteur, « un calme mental ». Pour cela, ils méditent énormément – six heures par jour en moyenne pour l’un d’entre eux – pour « progresser dans la connaissance de ses dépravations, ses kilesa », éliminer toutes les entraves et les dispositions néfastes et devenir un être accompli, éveillé : être juste, agir juste et penser juste. Comme le Bouddha, il atteint alors le nirvāna, l’extinction de la souffrance, de l’insatisfaction.

 

Ce qui est très frappant dans ces rencontres, c’est que si le moine ermite est pratiquement toujours seul, des personnes assurent quand même l’intendance, et les habitants de la région viennent régulièrement le visiter.

 

Un jour par semaine (wan phra, le jour du moine), les adeptes laïcs viennent au temple pour acquérir des mérites. Certains moines ont un dek wat (enfant du temple), un gamin qui rend de menus services, ou une mae chee (nonne en blanc) qui prépare le repas. Les villageois apportent de la nourriture, ils reçoivent parfois des visites d’autres bonzes, ont quasiment tous un téléphone portable, par sécurité. Parfois des chauffeurs se proposent pour les emmener au village. Les dons sont nombreux – ils permettent d’acquérir du mérite –, sauf dans les régions très pauvres.

 

Certains ermites vivent complètement reclus, avec une ascèse très sévère, mais en général, il existe un réel support mutuel entre les laïcs qui couvrent leurs besoins vitaux et les moines qui en échange exposent l’enseignement du Bouddha. Comme le dit l’auteur en conclusion de ce livre passionnant : « Puisse ce présent ouvrage permettre de saisir à travers ces dix témoignages que l’isolement est un moyen plutôt qu’une fin et que l’interdépendance entre tous les êtres est une évidence irréfragable, quel que soit leur mode de vie ».

 

M.C.

 

Chez les ermites bouddhistes, Luc Mauger

Editions Imago – 2016 – 176 pages

http://editions-imago.fr

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