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Le restaurant des recettes oubliée. Deuxième service

Date de publication : 27/04/2024
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Livre Le restaurant des recettes oubliées. Deuxième service

 

Vous avez dit Kyoto et ses souvenirs (gastronomiques). Une chronique culinaire et culturelle de François Guilbert.

 

Alors que le premier volume du Restaurant des recettes oubliées sort en format de poche (J’ai Lu), voici en librairie le deuxième tome d’une série qui en compte six. Les six nouvelles qu’il contient, ont été publiées au Japon il y a dix ans mais les tranches de vie contées sont intemporelles. Les clients du restaurant Kamogawa, du chef Nagare et sa fille Koishi, sont toujours en quête de retrouver une saveur inoubliable de leur passé.

 

Les plats auxquels ils aspirent sont souvent loin de relever de la haute cuisine de Kyoto. Tous fleurent bon un souvenir d’antan. Cette nostalgie n’est pas celle d’une culture gastronomique perdue mais d’un instant de l’existence que l’on veut absolument revivre encore une fois, pour se remémorer un être cher disparu, pour partager quelque chose profondément ancré en soi. Des histoires touchantes, intimes, toujours empreintes d’émotions envahissantes.

 

Le cadre où l’on veut revivre son passé est un discret estaminet kyotoïte où l’on se rend comme l’on va à un cabinet de détective. On s’y épanche beaucoup sur soi, ses relations, son passé, son présent et son futur. On y avive sa mémoire pour retrouver les senteurs, les saveurs perdues d’un menu ou d’un ingrédient manquant, Avec des informations délivrées par bribes, tronquées par le temps, les deux personnages centraux vont devoir s’échiner à reproduire quinze jours après le lancement de l’enquête le bento de riz à l’algue mori, le steak haché en sauce, le gâteau de Noël, le riz sauté, les soba à la chinoise et le bol de riz garni tendon qui firent tant impression autrefois.

 

Pour rendre au mieux les attentes et leur rendu, Hisashi Kashiwai a structuré chaque histoire en deux chapitres. Au premier, le client rapporte au cuisinier ce qu’il vient chercher et pourquoi. Pour le mettre en confiance, le chef Nagare prépare d’instinct un menu pour « faire parler ». Une fois établi le dossier d’enquête par sa fille, il partira en chasse pour reproduire le plat tant espéré. Si ses recherches ne sont pas dépeintes dans le détail, il n’en est pas de même des plats posés sur la table. Chacun est finement décrit. Certes, les recettes ne sont pas rédigées avec le calibrage de chaque ingrédient mais le chemin pour parvenir au produit final est suffisamment précis pour que l’on puisse être tenté de se lancer à son tour dans leur réalisation.

 

Ce voyage gustatif conduira le lecteur à (re)découvrir des spécialités des quatre coins de l’archipel (ex. le riz de la variété Tsuyahime de la préfecture de Yamagata, le poisson sabre d’Oita, les pousses de bambou de Nagoaka, les tsugaru soba de Hirosaki, le potiron de Shishigatani, la murène de Kyoto, les sardines de Setsubun…). On s’abreuve aussi de diverses variétés de thé (bancha, hojicha, ochazuke).

 

S’il se montre suffisamment attentif, le lecteur percevra combien les contenants sont importants pour les gourmets nippons. Au restaurant Kamogawa, en fonction du mets, on mange dans des assiettes en porcelaine Ginori. On plonge sa cuillère dans un bol en faïence Aokutani ou des porcelaines somertsuke et Kutani. La bouteille de saké peut se présenter en céramiques de Bizen et de Shigaraki. Les tasses sont, elles, faites de céramiques de Karatsu ou de Kiyomizu. Quant aux théières, elles ont fait appel à de la porcelaine d’Arita, au style Banko, et aux céramiques de Kyoto et de Mashiko. Cette harmonie de la table nourrit la quiétude du récit. Au final, la note du repas est au bon cœur du quémandeur. Pas de frustration dans cette cuisine où l’état d’esprit du temps, du chef et de la fine gueule font bon ménage. A bientôt donc M. Hisashi Kashiwai pour un troisième service. Vos huis clos ont fait de succès de librairie et d’une série adaptée à la télévision japonaise.

 

Hisashi Kashiwai : Le restaurant des recettes oubliées. Deuxième service, Mami, 252 p, 19 €

 

François Guilbert

 

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