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Les délices d’Edo

Date de publication : 04/02/2024
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Les délices d’Edo - Histoire illustrée de la gastronomie japonaise

 

La gastronomie Japonaise à l’honneur chez Flammarion

 

Une chronique culinaire de François Guilbert

 

Depuis décembre 2013, la gastronomie nippone (washoku) est inscrite à la liste du Patrimoine culturel immatériel dressée par l’UNESCO. Si passer par les tables des restaurants est une étape obligée, il y a bien d’autres manières d’aborder cet art culinaire d’exception. Brigitte Koyama – Richard a, elle, elle, le choix de nous y convier par ses connaissances de la peinture et de l’histoire. En académicienne rigoureuse et chevronnée, elle s’est focalisée sur le temps d’Edo (1603 – 1868), l’ère si influente sur aujourd’hui.

 

Les photos de plats exposés en fin de volume à partir des peintures anciennes sont là pour nous le mettre sous les yeux (cf. les brochettes d’anguille grillée, le plat du nouvel An O-zôni, les légumes et les brochettes dengaku grillées, les bentos de pique-nique, le dessert d’haricots rouges bouillis et de mochi). Ses sources ? Les rouleaux peints (emakimono) et les estampes ukiyo-e.

 

Mettant à profit sa connaissance encyclopédique des sources picturales auxquelles la professeure émérite de l’université Musashi de Tokyo a déjà consacré plusieurs ouvrages (cf. La magie des estampes japonaises (Hermann, 2004) Les Estampes japonaises (Scala Eds Nouvelles, 2014), Jeux d’estampes Images étranges et amusantes du Japon (Scala Eds Nouvelles, 2015), Shin hanga, les estampes japonaises du XXe siècle (Scala Eds Nouvelles, 2021), Tokyo, nouvelle capitale – Les estampes japonaises de l’ère Meiji (Scala Eds Nouvelles, 2022)), l’autrice a décidé de recenser et décrire tous les aspects possibles des arts de la table.

 

Reprenant l’approche qu’elle avait adoptée pour s’intéresser à l’univers des enfants (Kodomo-e, Hermann, 2004), la représentation de la femme (Beautés japonaises, Scala Eds Nouvelles, 2016), aux bons et aux mauvais esprits (Yokai, Scala Eds Nouvelles, 2017) ou encore aux animaux dans la peinture japonaise (Scala Eds Nouvelles, 2020), la prolifique autrice nous mène des étals des marchés aux assiettes les plus raffinées. Pour autant, la cuisine de cour des règnes de la famille Tokugawa n’est pas dépeinte en tant que telle.

 

Ici, pas de recettes, pas d’études des terroirs mais un exposé charpenté sur sept piliers thématiques (Edo, la capitale de la gastronomie ; les richesses de la mer ; les produits de la terre ; les desserts ; les lieux de consommations ; les repas de fêtes au fil des saisons), abondamment illustré. A chaque chapitre, une courte présentation suivie d’exemples imagés et expliqués en quelques lignes. Un travail de documentation exceptionnel !

 

L’étude est le fruit d’un travail incroyablement savant. Néanmoins, le niveau de lecture est demeuré accessible à tous. Certes, les connaisseurs des singularités des cuisines honjen, kaiseki ou shojin ne sont pas légions mais les profanes pourront se référer à un glossaire gastronomique très détaillé en fin de volume. On peut aussi lire l’ouvrage comme on prend une bande dessinée ou une encyclopédie avec ses multiples entrées. Comment, en effet, ne pas se plonger avec délectation dans les volets consacrés aux sashimis, aux sushis, aux nouilles, au pot-au-feu (nabe), au saké, aux instruments de cuisson, à la vaisselle de table, aux étales des quartiers ou aux banquets traditionnels, et à tant d’autres sujets variés encore ? Signe que l’on peut être très sérieux et léger à la fois, les deux pages d’onomatopées gustatives présentées parmi les annexes.

 

A toutes les pages, on en prend plein les yeux. Le souci du détail de l’iconographie y est pour beaucoup, tout autant que l’attention portée par les chefs à la présentation très ordonnée de leurs mets. C’est à une véritable balade culinaire à laquelle vous convie Brigitte Koyama – Richard. Géographiquement, on déambule des échoppes de coin de rues aux maisons de thé, des domiciles aux salles de spectacles de kabuki. Le voyage au travers de l’archipel est moins documenté. Dommage ; la façon de préparer les plats diffère tant selon que l’on est dans le Kansai ou dans le Kanto. Autre regret, le choix du papier d’impression. Pour un volume qui parviendra à ses lecteurs d’Asie à plus de 40 euros, on aurait aimé tourner des pages plus lumineuses et enchâssées dans une couverture plus solide. Toutefois, le parti pris pour l’impression conduit à manier un livre peu lourd au regard de son format et de sa pagination.

 

Brigitte Koyama – Richard : Les délices d’Edo. Histoire illustrée de la gastronomie japonaise, Flammarion, 2023, 255 p, 39,9€

 

François Guilbert

 

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