« Il faut agir tout de suite pour mettre fin aux assassinats perpétrés aux Philippines dans le cadre de la meurtrière « guerre contre la drogue » lancée par le gouvernement de Rodrigo Duterte » a déclaré le 24 juin Leila Matar, directrice adjointe de l’organisation Human Rights Watch à Genève, auprès du Conseil des Droits de l’Homme (HRC/Human Rights Council), l’organe des Nations Unies chargé de renforcer la promotion et la protection des droits de l’homme dans le monde entier.
Si vous vivez aujourd’hui dans une zone urbaine pauvre des Philippines, vous avez de bonnes raisons de craindre que vous ou un membre de votre famille ne soyez impliqués dans la meurtrière «guerre à la drogue» du président Rodrigo Duterte.
Et si vous êtes un politicien, un activiste ou un journaliste qui s’exprime ouvertement au sujet de la dite guerre, préparez-vous à subir harcèlement et intimidation de la part des plus hautes autorités du pays.
Tel est le tableau qu’a dressé le 24 juin devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU la directrice adjointe de Human Rights Watch Leila Matar
Aux Philippines, les droits de l’homme n’ont pas cours. Les milliers d’exécutions extrajudiciaires et une répression des libertés fondamentales ont provoqué un tollé général, mais aucune action énergique de la part des États membres de l’ONU.
Selon l’organisation internationale de défense des droits de l’homme, les assassinats ont commencé peu après l’entrée en fonction de Rodrigo Duterte, en juin 2016, et se poursuivent encore aujourd’hui.
La police insiste sur le fait que les personnes tuées étaient des trafiquants de drogue ou des utilisateurs qui ont résisté au moment de leur arrestation, mais des témoignages nombreux et concordants assurent que la police et leurs agents auraient placé des armes à feu et de la drogue sur les corps des victimes pour justifier leurs exécutions.
27000 personnes tuées
En mars 2019, le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a déclaré qu’environ 27 000 personnes avaient été tuées, et que personne n’a été traduit en justice, à l’exception d’une seule affaire très médiatisée.
La police conteste ce chiffre, mais admet avoir tué plus de 6 600 personnes, ce qui ne fait que souligner la nécessité d’enquêtes sérieuses, que le gouvernement n’a évidemment pas voulu entreprendre.
Les défenseurs des droits de l’homme, les politiciens et les journalistes disposés à faire un reportage ou à dénoncer la «guerre de la drogue» ont été harcelés, menacés et arrêtés.
De nombreux militants ont été assassinés dans le cadre de la campagne anti-insurrectionnelle du gouvernement.
Refus de coopération avec l’ONU
Les Philippines sont membres du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies et devraient donc respecter les normes en la matière.
Au lieu de cela, le gouvernement a refusé de coopérer et a même publiquement dénigré des experts de l’ONU qui condamnent ses violations.
Dès juin 2017, un grand nombre d’États ont exprimé leurs préoccupations dans une déclaration commune au Conseil.
Deux autres déclarations ont suivi, la dernière annonçant une action formelle du Conseil si la situation ne s’améliorait pas, ce qui ne va pas manquer de se produire, le président Duterte ayant promis que sa «guerre contre la drogue» ne fera que s’aggraver.
Début juin, onze experts des droits de l’homme des Nations Unies ont dénoncé le «nombre impressionnant de morts illégales et d’assassinats par la police» et ont appelé le Conseil à mettre en place une enquête indépendante dans les meilleurs délais.
Patrice Montagu-Williams