Sécheresse, barrages, le Mékong s’appauvrit au fil des ans, bouleversant l’écosystème d’un fleuve qui fait vivre depuis des lustres la population de six pays. Le long de la route qui va de Chiang Khan à Nong Khaï, on découvre au détour d’un méandre, un étonnant temple perché sur une colline, le Wat Pha Tak Suea, que décrit Michel Hermann dans cette série de chroniques sur « La mère de tous les fleuves ». Bonne lecture.
Vertige des espaces où le regard se perd,
Sur cette plateforme au plancher vitré,
On domine l’indolente et verte vallée
Où coule le Mékong, défiguré mais fier.
Essoufflé et curieux sous un soleil brûlant,
On scrute, interdit, la vue panoramique:
Thaïlande et Laos mêlés, lieu magique
Et calme vu d’en haut, figé et fascinant.
Dessous c’est le vide, sublime et attirant,
Que l’on voit sous ses pieds ; gouffre de verdure
Qui semble vous happer, vous jeter en pâture
Dans cet abîme imaginaire et effrayant.
Au loin, on aperçoit la ville de Sangkhom,
Qui longe le fleuve. La vallée s’élargit
Pour devenir plaine. Le Mékong s’affranchit
Des montagnes et coule, poussif et bonhomme…
Autrefois dévolu à la méditation,
Le Wat Pha Tak Suea attire les touristes
Grâce à ce merveilleux spectacle. Il subsiste
En contrebas, un sanctuaire en surplomb,
Accessible par un étroit escalier
Collé à la paroi, humide et glissant.
Le temple abrite un Chedi contenant
Les cendres d’un célèbre moine forestier,
Luang Pu Ma, mort il y a plus de cinquante ans.
Venant de Chiang Khan, la route accompagne
Le Mékong, – insaisissable compagne
De notre aventure-, paisible et mouvant.
Au détour d’un méandre, sur la rive opposée,
On découvre Vientiane, où alternent
En désordre maisons anciennes et modernes,
Et quelques immeubles blancs plantés en retrait,
Que l’on devine à peine depuis Sri Chiang Maï.
Puis c’est Nong Khaï, ville frontière animée,
Avec ses berges et son Pont de l’Amitié
Qui relie les deux rives, laotienne et thaïe,
Où un peuple, dans un face à face inégal
Vit séparé par cette masse liquide.
Le Mékong conquérant, avance impassible,
Charriant limon, espoir et fluide vital …
Michel Hermann
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