Des millions de personnes sont au chômage technique en Thaïlande, y compris chez les bonzes, car les temples bouddhistes, pour éviter rassemblements et contacts à risque ont ralenti ou cessé leurs activités. Il y a 31 890 temples d’obédience Maha Nikaya au Siam, très anciens et richement dotés situés dans les villes, (et souvent propriétaires des quartiers qui les entourent), et 1 987 temples de l’ordre Dhammayutthika Nikaya, fondé en 1833 par le Prince Mongkut, devenu roi sous le nom de Rama IV. Ces derniers, plus austères, consacrés à la méditation, nichent souvent dans les forêts, à l’écart de l’agitation urbaine. Il y en a dix dans la Province de Sukhothai sur les 368 temples que compte la Province. Michel Hermann relate la vie de l’un d’eux, Bonne lecture donc.
A l’abri des regards, caché dans la forêt,
Le Wat Pa Bon Nuen, ce temple silencieux
De la méditation, semble abandonné,
Tel un bateau fantôme lâché par les dieux.
Mariages, décès, plus de cérémonies,
Pas de retraite bouddhiste pour écoliers,
Aucune vie sociale, marchés interdits :
Le temple et les bonzes sont auto-confinés.
Les « Bhikkhū » et leur Abbott ont même laissé
Leur vieux mini-van Toyota au garage ;
Aucune commémoration à célébrer
À domicile ; s’enfermer c’est plus sage …
Quelques robes safran, masques blancs sur le nez,
Sortent encore, pour recueillir les aumônes
Sur routes et chemins de campagne vidés ;
Maigre pitance en ces temps d’austérité.
Même le jour des bonzes, « Wan phra », qui reçoit
Les fidèles au temple ne fait plus recette,
Pas plus que la méditation, le « bhāvanā »,
Qui réunit religieux, laïques et ascètes.
Cuisinières bénévoles et bonzesses
Se font rares pour préparer le seul repas
Quotidien du matin. Cette vie de sagesse
Se complique sur les pas du Bouddha.
Les dévotieux, c’est-à-dire ici tous les Thaïs,
Désertent le temple dont ils sont si friands.
La population, active ou sans travail,
Par précaution, se protège en se cloîtrant.
D’obédience Dhammayutthika Nikaya,
Rite fondé par le Prince Mongkut, -futur
Roi Rama IV-, en mille huit cent trente-trois,
Ce temple de forêt niche dans la nature.
Contrairement aux riches temples des villes,
De l’ordre Maha Nikaya, plus anciens,
Et souvent dotés d’une école, fertiles
En évènements lucratifs souvent païens,
Celui-là, loin du vacarme de la cité,
Ne vit qu’avec les donations de fidèles
Qui, étrangement, sont des citadins aisés
Adeptes de ces monacales chapelles.
Temples des villes et temples des campagnes,
Les uns opulents et les autres dénués,
Vivent au ralenti. Le mien, dans ses montagnes,
Aussi : reclus et silencieux dans la forêt…
Michel Hermann