La sécurité n’est pas qu’une affaire de voie publique et de quartiers en difficulté. La sécurité importe aussi dans le milieu familial et scolaire, surtout en période de crise sanitaire. L’enfant apprendra mieux s’il peut se rendre à l’école en sécurité, et s’il ne craint pas d’y être agressé, contaminé. Ces problèmes, connus en Europe, apparaissent moins saillants en Asie. Et pourtant. Notre partenaire Christophe Fromont, Directeur de Security Diamond Services basé à Bangkok, et ancien gendarme à l’Ambassade de France de Bangkok nous livre son analyse.
Si les enfants thaïlandais reprennent juste le chemin de l’école, suite aux modifications des dates de semestres apportées par le gouvernement thaïlandais en raison de la pandémie de Covid-19. Les écoles internationales ouvriront à nouveau leurs portes au mois d’août et pour certaines comme le lycée français en septembre.
Le moment est donc idéal pour réfléchir à l’organisation de la sécurité dans les écoles internationales au regard de l’impact sanitaire du Covid-19.
La sécurité peut être parfois en contradiction avec la sûreté sanitaire et l’actualité sur le Covid-19 le met en évidence. Les écoles ou autres établissements recevant du public telles que les salles de spectacles ou les sites industriels, génèrent normalement des pics de flux dans les mouvements du public qui imposent dans cette période, des mesures sanitaires souvent au détriment des règles de sécurité car la situation de crise à forte couverture médiatique a tendance de nous détourner de ce droit fondamental qu’est la sécurité de chacun.
La sécurité doit être un état d’esprit permanent des personnes responsables de l’accueil du public même si les situations de crise du moment prennent un espace important dans les procédures d’accès dans les lieux publics. La sécurité ne doit jamais disparaître sous la pression engendrée par l’actualité et les aléas du moment.
Les écoles n’échappent pas à cette règle
Elles peuvent prendre parfois des décisions contraires au respect des règles fondamentales de sécurité souvent sur la base de bonnes intentions au départ. Il est difficile d’être spécialiste en tout… Une décision, une communication malheureuse, et c’est immédiatement l’inflation du risque ou l’embrasement de la crise.
La sûreté sanitaire dans le cas du Covid-19 impose une distanciation sociale qui oblige à garder un flux espacé et lent pour entrer au sein d’un établissement et éviter les contaminations. Par contre les risques d‘une longue exposition aux dangers dans la zone publique sont alors accentués car la menace criminelle ou terroriste n’a pas été éradiquée par le Covid-19. De longues files d’attente à l’entrée des lieux publics sont parfois constatées à cause des règles de distanciation.
La doctrine sécuritaire doit à l’inverse, extirper le public le plus rapidement possible de ce danger potentiel que constitue les regroupements et faciliter la circulation afin d’éviter de compacter les flux.
La sécurité se dresse toujours en premier rempart car, même si une faute en terme de salubrité devait conduire à des risques sanitaires, la sécurité, quant à elle, n’offre jamais de seconde chance face au pire.
Mais la sécurité, bien que prioritaire, doit s’adapter continuellement aux enjeux et aux conditions naturelles, sanitaires, ou contextuelles. Ces ajustements tiendront compte des aspects culturels, cultuels, pénaux de chaque pays et de l’activité du site impacté.
En terme sanitaire, il faut lutter contre la propagation du fléau, en terme sécuritaire, il faut lutter contre la vulnérabilité du public en gardant à l’esprit le nerf de toute guerre … l’argent ! En effet, la mise aux normes de chaque facette dans chaque secteur coûtera si cher que c’est malheureusement la politique du moins pire qui s’applique toujours.
L’ordre est garant de la paix
Le premier outil, et de loin le plus constructif à employer est la règle. Elle permet de donner une ligne de conduite et de mesurer le temps et les espaces. Cet outil est malheureusement le moins utilisé. En effet, les règles sont généralement ressenties comme des atteintes à la liberté et doivent être accompagnées d’une communication adaptée et de fermeté dans la mise en application. Les valeurs intrinsèques des dirigeants sont alors souvent mises à contribution et on préfèrera souvent le flou artistique du non-dit à la prise de responsabilité. Cette règle est néanmoins un outil salvateur et le moins cher qui soit. A mesure que chacun la suit, les mesures s’imbriquent, et le plan global de mise en sûreté prend forme et assure la sérénité de tous. Cet outil est à utiliser sans modération à mesure que la gravité des évènements le dicte, car plus la situation deviendra critique et plus les mesures devront être précises, et la tolérance tendra vers zéro.
Cette phrase prend tout son sens dans une école, où la sécurité doit être l’absolue priorité puisqu’elle est la seule garante de la vie. Bien entendu, dans le cadre précis de cette période d’incertitude sanitaire, il convient de dépister, informer et appliquer les mesures barrières et donc disperser et ralentir les flux, mais il n’est pas question pour autant d’exposer petits et grands.
Il est en effet inconcevable que l’actualité impose ses conditions si elle interfère dans le fonctionnement de la sécurité. Les procédures de sécurité peuvent s’adapter en intégrant de nouvelles mesures liées aux potentielles contagions. Exemple, une école peut diviser ces flux d’écolier en plusieurs temps ou espaces. Un premier espace sécuritaire où les règles sanitaires seront prioritaires sera accessible après un contrôle de la non dangerosité des individus et des véhicules ; une seconde partie sanitaire assure la « stérilité » de l’ensemble au sein d’un espace adapté. Le tout sous couvert d’un règlement strict et connu de tous…
Découper les temps et / ou des espaces.
1/ Premier temps / espace : Mise en sécurité. Mise en place d’une première zone dite « tampon » suffisamment grande pour respecter les normes liées à la crise du moment, la règle ajustera les flux en fonction. Cette zone est censée contrôler, non pas les identités, mais uniquement la dangerosité potentielle des individus par des contrôles basiques visuels et de détections des métaux par exemple. Peu importe qu’une personne entre sans droit, le contrôle est simplement dédié à détecter une éventuelle menace directe et ne porte que sur la possible nocivité des entrants. Ces « contrôlés » sont donc en attente dans cette zone « tampon », mais néanmoins extraits de l’espace public. Les personnes sont donc en sécurité dans une enceinte close et doivent respecter les règles et gestes barrières. Puisqu’une règlementation spécifique a été mise en place à l’aide d’experts (dans le meilleur des cas) ou par l’établissement lui-même, il est aisé de procéder sans urgence au contrôle identitaire et sanitaire.
2/ Deuxième temps / espace : Contrôle et sûreté. Tout le monde est invité, toujours selon les règles en place, à se présenter de la zone « tampon » à la zone « stérile » (un sas par exemple). Là, les mesures sanitaires en vigueur seront dispensées ainsi que les rappels et sensibilisations du moment. L’accès à la zone « saine » sera ensuite donné à partir de ce sas. Bien entendu, cela enjoint chacun à se plier aux règles et donc souvent être contraint à se protéger de soi-même bon gré mal gré…
Par ce simple exemple, nous établissons un processus qui permet dans un premier temps de sécuriser les personnes, puis dans un deuxième temps de donner accès aux personnes en conformité avec la législation et les mesures actuelles. Aucun établissement ne peut se prétendre exempt de suivre ces règles par manque d’espace, de moyens ou de personnels. Car si, véritablement, il est impossible en l’état d’offrir ce fonctionnement minimum, il n’est pas possible de rester opérationnel avec juste le simple espoir que rien n’arrive…. Les règles doivent prendre en compte tous les éléments contextuels et les dirigeants doivent en tirer les conséquences dans la logique du « maximum de perte acceptable » considérant que le maximum de vies perdues est zéro.
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