C’est un fait qui s’observe depuis la nuit des temps : les noms de pays ou de villes ont souvent été attribués par des étrangers aux lieux qu’ils découvraient. Il en fut ainsi pour Bangkok dont le toponyme a été repris et internationalisé par des éléments allogènes, au XVIIe siècle, à l’époque de l’arrivée au Siam des émissaires de Louis XIV. Selon l’explication la plus répandue (mais ce n’est pas la seule), cela viendrait de la contraction de «Bang Ma-kok» qui est généralement traduit par «lieu planté d’oliviers».
«Bang» désigne bien une bourgade établie en bord de mer ou de rivière, mais il n’y a pas vraiment d’olives sous ces latitudes, sinon une variété de prunes sauvages. Ma-kok est la spondias dulcis, ou prune de Java. «Ma» est un préfixe siamois que l’on retrouve fréquemment dans les noms de fruits (ma-krout: bergamote, ma-kham : tamarin, ma-nao : citron, ma-kheua : figue, ma-phrao : noix de coco, ma-mouang : mangue…).
Mais pour les thaïlandais et l’administration, depuis qu’elle est devenue capitale royale à la fin du XVIIIe siècle, ce n’est pas Bangkok mais Krung-Thep, petite partie émergée d’un iceberg logorrhéique: Krung Thep Mahanakhon Amon Rattanakosin Mahinthara Ayutthaya Mahadilok Phop Noppharat Ratchathani Burirom Udomratchaniwet Mahasathan Amon Piman Awatan Sathit Sakkathattiya Witsanukam Prasit, correspondant à “Capitale des dieux, grande cité, éternel trésor d’Indra, forteresse invincible, carrefour de l’univers, écrin des neufs joyaux, métropole radieuse, sublime résidence royale, magnifique lieu de vie, inaltérable demeure céleste, incarnation permanente, ville consacrée à Indra, œuvre de Vishnu l’ingénieur cosmique”.
C’est certainement le nom de ville le plus long au monde, mais comme les autochtones ont le sens du raccourci, il n’est pas rare de les entendre dire, quand ils sont en province : «Paï Thep» (aller à Bangkok) : difficile de faire plus simple !
Crédit photo : Royal Thai art