Toute société est forcément hiérarchisée. Les bases du système social thaïlandais (sakdina) furent établies par le roi Boromma-Trailok-Nat, il y a un demi-millénaire. Sakdi vient du sanskrit « shakti » (énergie, pouvoir) et na est le mot thaï pour « surface cultivée ». Les terres étaient attribuées par le souverain, en récompense à ses sujets les plus fidèles.
Il y avait donc les propriétaires terriens et puis les autres, avec les privilèges et les obligations que cela suppose. Ces règles se sont naturellement adaptées au fil des siècles. Le roi Rama Ier, fondateur de la dynastie actuelle, les avait codifiées officiellement dans son recueil de lois. Elles furent ensuite logiquement abolies lors du coup d’État de 1932.
Mais on n’efface pas ainsi ce qui est ancré dans la conscience collective depuis si longtemps. Surtout lorsque l’immense majorité de la population avait accepté l’ordre établi, définissant précisément le rang de chacun selon sa naissance et ses mérites. Un principe fort complexe et subtil sur lequel historiens et sociologues continuent d’ailleurs de se pencher.
Grosso modo, il s’agissait d’institutionnaliser les rapports entre l’aristocratie et le peuple. Une sorte de système des castes en constante évolution, au gré des mouvements de l’Histoire. Ainsi, les immigrants chinois, au départ exclus de l’échelle sociale, ont fini par se retrouver dans les hautes sphères, grâce à leur labeur.
Ce système semble s’apparenter au régime féodal en vigueur chez nous jusqu’au 4 aout 1789. Mais ensuite la Restauration distinguait les propriétaires et le suffrage censitaire ; On voit encore de nos jours en Thaïlande la distinction entre le domaine “utile” les meubles, les maisons de bois) et le domaine “éminent” (le sol), qui est nécessairement réservé aux Thaïlandais.