Le professeur Apinan Poshyananda est l’ancien secrétaire permanent du ministère de la Culture, soit le haut fonctionnaire au grade le plus élevé dans la hiérarchie de ce ministère. Il a donné le 16 juillet un entretien décapant au quotidien en ligne anglophone The National. Une interview en forme de message et de signal d’alarme adressé au nouveau ministre, l’ancien maire de Pattaya, Ittipol Khunpluem.

Cet entretien a initialement été publié dans «The Nation» dont la version en ligne (en anglais) est disponible ici.

Le nouveau ministre de la Culture va-il pouvoir vraiment promouvoir les arts ?

Félicitations au nouveau ministre… Il aura besoin de beaucoup de soutien. Le problème est que pour les gouvernements thaïlandais successifs, en particulier ceux dirigés par l’actuel premier ministre, leur conception de la culture repose sur des mandats de propagande en faveur du populisme et de la thaïlandais.

Des chansons qui suscitent la ferveur nationaliste, des festivals culturels et des défilés pour divertir les masses. J’espère que l’ancien maire de Pattaya, maintenant en charge de ce ministère, sera clairement en mesure de faire la différence entre les bonnes vertus et les mauvais vices.

Le gouvernement Prayuth a promis de promouvoir des campagnes thaïlandaises de «pureté» et de «sourire»…

Il est urgent que le nouveau ministre dissipe le schisme et la méfiance entre les autorités, le public et les jeunes en ce qui concerne les questions de censure et de contrôle des manifestations basées sur l’art.

Au lieu de contrôler les expressions de dissidence, il devrait immédiatement ordonner le retrait de l’image du Bouddha créée par l’artiste nationale Panya Vijinthanasarn, qui est affichée de manière irrespectueuse devant les toilettes du Paradiso Café de l’exposition d’art internationale Venice Biennale !

Même les visiteurs étrangers ont exprimé des préoccupations quant à l’inadéquation et à l’absence de décorum dans l’affichage de cette œuvre. Le commissaire, l’artiste et le directeur du bureau de l’art et de la culture contemporains du ministère de la Culture devraient en assumer la responsabilité.

Le nouveau ministre devrait également réclamer de toute urgence l’ouverture du musée d’art contemporain, suspendu depuis plusieurs années. Ce projet inachevé près du Centre culturel thaïlandais (sur la route Ratchadaphisek) est devenu le «monument de l’embarras» du ministère de la Culture.

La Thaïlande, plaque tournante culturelle de l’ASEAN, n’est qu’un rêve creux qui n’aboutira pas. Où est passé tout l’argent ? Pourquoi les entrepreneurs continuent d’abandonner le projet ? Pourquoi n’y a-t-il pas de projets concrets pour des expositions, des collections ou la formation d’experts en art ? Il est temps que la culture, dans le royaume, cesse de rimer avec propagande.

Le parti Phalang Pracharat a déclaré vouloir faire de la capitale Bangkok 5.0, en la divisant en neuf zones d’innovation avec la technologie 5G. Qu’en pensez-vous ?

C’est l’histoire de la carotte et du bâton. Ce sont des rêves creux. Avons-nous vraiment besoin de ces zones innovantes, lorsque la classe créative perd sa liberté de pensée innovante ?

La meilleure manière de soutenir la vitalité culturelle est de ne pas étouffer l’imagination créatrice par le militantisme culturel, le sentiment de supériorité culturelle et l’arrogance nationaliste.