Le geste est fort de la part des étudiants thaïlandais qui ont promis de faire de ce week-end de protestations un tournant de leur mouvement pro-démocratie. Ce samedi, l’occupation de l’université de Thammasat, face à l’esplanade de Sanam Luang, a démarré. Pour combien de temps ? Et avec quels risques ? C’est dans ce campus qu’eurent lieu, dans les années 70, les répressions les plus sanglantes par l’armée lors de précédents soulèvements étudiants.
Alors que l’occupation de Thammasat est en cours, le magazine américain Time a publié en ligne un portrait de Arnon Mampa, l’avocat des droits de l’homme plusieurs fois arrêté, leader du mouvement.
“Les gens en ont assez de vivre sous un régime répressif”
“Les gens en ont assez de vivre sous un régime répressif”, a-t-il répété à l’hebdomadaire américain alors qu’une grande majorité des thaïlandais , à travers le royaume, s’inquiète des conséquences de ce mouvement et d’une possible déstabilisation du pays déjà durement secoué par la crise économique engendrée par la pandémie de coronavirus. «L’appel au changement de système ébranle la société juge un diplomate. Voulons-nous vraiment, dans ces moments difficiles, prendre le risque de mettre le pays à genoux ?»
Un manifeste en 10 points
Dans le sillage d’Arnon, une faction d’étudiants a publié un manifeste en 10 points appelant à la réduction du budget national alloué au roi Maha Vajiralongkorn, estimé être l’un des monarques les plus riches du monde. Le manifeste demande également la fin des “relations publiques et de l’éducation” qui glorifient “excessivement” la monarchie, une enquête sur “le meurtre de ceux qui critiquent” la monarchie. La monarchie est protégée en Thaïlande par une loi très répressive sur le délit de lèse-majesté.
“Que cela s’arrête dans notre génération” est devenu un cri de ralliement, tandis que les manifestants lancent le salut à trois doigts des Hunger Games.
De nombreux Thaïlandais continuent à soutenir le palais
Il est certain que de nombreux Thaïlandais continuent à soutenir le palais, une institution largement considérée comme presque sacrée. “Nous sommes d’accord avec l’évolution, mais pas avec la révolution comme ce groupe a essayé de le faire”, déclare l’homme politique Warong Dechgitvigrom, qui a lancé un groupe royaliste de contre-protestation appelé Thai Pakdee, ou Loyal Thai. Le plus grand rassemblement du groupe à ce jour, qui s’est tenu à Bangkok à la fin du mois d’août, a attiré environ 1 000 sympathisants. Warong affirme qu’ils n’ont pas prévu d’autres manifestations ; ils se concentrent plutôt sur “l’éducation du peuple” concernant les manifestants “anti-monarchistes”.
Au sein du mouvement de protestation aussi, tout le monde n’est pas favorable à la remise en question du rôle de la monarchie. Certains craignent que la controverse ne mette en péril les autres objectifs, à savoir une révision du système politique et de nouvelles élections dans le cadre d’une constitution révisée.
La nouvelle manifestation de ce 19 septembre n’est pas, et de loin, la plus grande manifestation de l’histoire de la Thaïlande, qui a connu des soulèvements et des mesures de répression. Mais l’ambition des réformes demandées est inégalée.
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