Qui connaît aujourd’hui Buriram ? Cette province de l’Isan, située à 400 kilomètres au nord-est de Bangkok, est en passe d’accéder au rang de capitale asiatique des sports mécaniques en accueillant ce week-end son premier Grand prix Moto GP. Plus de 100 000 visiteurs sont attendus. Comment une telle aventure a-t-elle été possible ? Plongée dans l’ascension d’une ville et de son homme fort : Newin Chidchob.
Difficile d’écrire sur Buriram sans y associer le nom de Newin Chidchob, le cacique de la région dont les jeux d’alliances font et défont la politique thaïlandaise depuis les années 2000.
Tombé en disgrâce en 2010, Newin, ex allié de Thaksin Shinawatra, se retira alors dans son fief de l’Isan en décidant de se consacrer à sa seconde passion après la politique : le football et les grosses cylindrées.
Fin 2009, le premier acte de ce politicien féru de sport et d’argent est de prendre la direction du club de football de Thai League Provincial Electricity Authority.
Il transfère celui-ci à Buriram et rebaptise l’équipe Buriram United FC.
Convaincu que la promotion du sport peut encourager le développement de sa région natale tenue à l’écart du dynamisme de Bangkok, Newin ordonne la construction d’un stade de 35 000 places, baptisé « le château du tonnerre » [« thunder castle »], pour un montant de 2 milliards de bahts.
Un château pour « le baron de Buriram »
La construction du « château » est achevée dès 2011, un record, selon la population locale, en comparaison avec les projets d’infrastructures publiques menés habituellement par le gouvernement central.
De quoi conforter Newin dans son image publique de « baron de Buriram ».
Depuis, le stade du Buriram FC et ses joueurs ont acquis une aura régionale dans le football asiatique grâce à leurs victoires successives en championnat thaïlandais (2013, 2014, 2015 et 2017) et à leur participation régulière aux championnats de l’ASEAN.
L’homme fort de l’Isan ne s’arrête pourtant pas là.
Sitôt la dernière pierre du Thunder Castle apposée, Newin contacte l’ingénieur allemand Hermann Tilke, ancien pilote spécialisé dans la conception de circuits de Formule 1.
En Asie et au Moyen-Orient, ce dernier est réputé pour être l’auteur, notamment, des circuits de Bahrain, Shanghai, Istanbul… Cette fois-ci, Tilke se voit assigner comme tâche de concevoir un circuit de F1…au milieu des rizières !
Un circuit F1 au milieu des rizières
Tilke relève le défi, avec ce parcours de 4,6 km, doté de 12 virages, qui soumet les pilotes à des températures élevées, proches des 45°C sur la piste.
Coût total du projet ?
60 millions de dollars, financé par la marque de bière Chang du groupe Thai Beverage, qui donne ainsi son nom au circuit.
Inauguré en 2014, le circuit de Buriram est appelé officiellement le Chang International Circuit, et devient le premier circuit homologué F1 de Thaïlande.
Il y accueille plusieurs compétitions internationales, telles que la Porsche Carrera Cup et le Championnat du monde de Superbike.
La Formule 1, elle, se fait encore attendre.
Pour l’heure, les bolides à quatre roues font escale en Asie du sud-est sur deux circuits : Singapour et Sepang, en Malaisie
Promouvoir l’Isan : objectif réussi ?
« Je voulais apporter au pays quelque chose qu’il n’avait pas », confiait, l’an dernier, Newin au Straits Time.
Dans la géographie du tourisme thaïlandais, Buriram s’impose ainsi comme un point de passage obligé pour les amateurs d’évènements sportifs de grande envergure.
L’an dernier, 3 millions de touristes ont assisté aux matchs et courses autos, 100 000 étant attendus pour le Grand Prix Moto.
Si l’organisation de telles manifestations draine des fonds considérables dans une province qui compte parmi les plus pauvres du royaume, il reste difficile d’évaluer leurs retombées exactes.
Cet afflux de liquidités a cependant considérablement aidé à la modernisation de Buriram, laquelle s’est dotée d’un parc hôtelier de 5000 lits… soit 5 lits pour un habitant !
Les paisibles rizières de l’Isan n’ont pas fini d’entendre rugir les 500 cm3.
La Sports Authority of Thailand (SAT) est parvenue à sécuriser un contrat jusqu’à 2020 pour l’organisation de l’évènement.
Deux autres grands prix moto sont donc au programme.
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