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THAILANDE – TOURISME: Koh Samet : après l’opération mains propres

Journaliste : Redaction
La source : Gavroche
Date de publication : 26/07/2018
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Chaque vendredi dès la mi-journée, c’est la grande effervescence au terminal de bus Ekkamai, à l’est de la capitale. Les Bangkokois se pressent pour rejoindre Ban Phe, le port de pêche du littoral d’où partent les ferries vers Koh Samet. Les plages de sable blanc de l’île sont les plus prisées pour s’échapper de la ville le temps d’un week-end. Lorsque le trafic est fluide dans les grandes artères de la capitale, il faut moins de trois heures pour rejoindre ce petit port de pêche tourné vers le tourisme thaïlandais, avec ses bars karaoké et son grand marché aux fruits de mer. L’île, classée parc national, a retrouvé son charme suite aux opérations menées par la junte début 2017 afin d’endiguer une corruption locale trop manifeste.

 

Depuis le petit port de Ban Phe, les horsbords rutilants et les bateaux en bois plus rudimentaires mettent entre 30 et 45 minutes pour rejoindre le débarcadère de Na Dan, porte d’entrée du petit paradis de fin de semaine des salariés de la capitale. A Koh Samet, le visiteur est accueilli par une créature géante à moitié immergée, une main sur la poitrine, l’autre tendue et ornée de guirlandes de fleurs.

 

L’étrange statue représente Pisua Samut, un personnage mythologique né de l’imagination de Sunthorn Phu, un poète de la Cour royale, qui aurait composé cette saga épique de 30 000 lignes en 1821. Un chef d’oeuvre de littérature thaïlandaise enseigné à l’école, et qui conte l’histoire de deux princes d’un ancien royaume de Siam envoyés par le roi dans une contrée lointaine pour parfaire leur éducation. Au cours de cette épopée, l’un des deux princes, devenu joueur de flûte, affrontera milles dangers, rencontrant des géants de la mer et des sirènes ravissantes. Mais derrière ses traits séduisants, Pisua Samed – littéralement le papillon des océans – est en réalité une ogresse. Le prince sera alerté par une sirène qu’il réussit à charmer avec sa flûte, et les deux réussiront à se réfugier à Koh Kaew Phitsadan, l’ancien nom de Samed. D’autres statues représentant les protagonistes de ce poème célèbre se cachent à travers l’île.

 

Un parc national qui avait pris du plomb dans l’aile

 

Dès le premier pied posé au nord de l’île, le visiteur – après s’être acquitté d’une taxe de 20 bahts par personne pour l’entretien du petit port – découvre de belles plages de sable blanc baignant dans une eau turquoise. Une deuxième taxe est exigée un peu plus loin, pour l’entrée du parc national (200 bahts pour les étrangers, 40 bahts pour les Thaïlandais).

 

Les plages situées directement à droite du débarcadère (une succession de petites plages non nettoyées à part celles des hôtels installés sur cette partie nord de l’île), où s’est installée la petite communauté de pêcheurs, ne font pas partie du parc national. Le ticket, théoriquement valable cinq jours, doit être présenté à chaque passage du portique, mais la majorité des hôtels sont situés au sud du petit village presque entièrement tourné vers le tourisme.

 

Après avoir dépassé le grand Bouddha visiblement assez récent accolé au temple de l’île, le visiteur se retrouve rapidement sur la plage de Had Sai Kaew – littéralement la plage de sable blanc – qui malgré son nom, n’est pas la plus belle de l’île, et certainement pas la moins calme. Le soir, les bars font cracher les décibels alors que les Thaïlandais dînent sur de grandes tables orientées face à l’océan en profitant du spectacle des jongleurs de feu dans une ambiance endiablée.

 

Pas l’endroit idéal pour les couches-tôt. Encore récemment, Koh Samet avait la réputation de n’avoir de parc national que le nom, surtout après l’afflux massif des longs week-ends fériés. Au début de l’année dernière, l’armée a entrepris une vaste opération de reprise en main de l’île, laissée à l’abandon – selon les mots du gouvernement – par une mafia locale qui ne semblait montrer que peu d’intérêt, excepté les conséquentes rentrées d’argent, à la protection du site.

 

L’armée, s’appuyant sur l’autorité de l’agence des Parcs nationaux du pays a annoncé la fermeture d’une vingtaine de resorts, qui ont été contraints de détruire avec effets immédiats une cinquantaine de bâtiments installés illégalement – et souvent peu harmonieusement – sur une île qui n’est pas extrêmement étendue.

 

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Depuis 2017, Had Sai Kaew (la plage de sable blanc) est bien moins encombrée de speed boats que par le passé.

Quelques 80 gardes forestiers et leurs chefs accusés d’avoir détourné les recettes des entrées du parc pendant des années ont été limogés par le directeur, qui lui n’aurait pas été inquiété. L’autorité des parcs nationaux a également saisi des bateaux rapides et du matériel de location (scooters, jet-skis, bateaux bananes etc..) et fait fermer sept jetées illégales, les deux jetées restant opérationnelles faisant l’objet de plus de surveillance par les nouveaux curateurs du parc.

 

Les jet-skis et les speed-boats sont désormais interdits, et les plages ont retrouvé une apparence plus paisible, moins dangereuses d’une part pour les nageurs, et salvatrice d’autre part pour l’environnement de l’île qui s’était dégradé. D’aucuns dénoncent des procédures qui pourraient avoir ciblés en particulier certains contrevenants alors que d’autres – plus proches du gouvernement selon leurs détracteurs – auraient pu avoir échappé aux amendes.

 

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Depuis 2017, Had Sai Kaew (la plage de sable blanc) est bien moins encombrée de speed boats que par le passé

Le sud de l’île est plus sauvage et encore préservé

 

En tout état de cause, l’île a retrouvé une allure plus fidèle à l’image généralement associée à un parc national, une situation – plages sales et constructions tout azimuts – qui avait le don de frustrer certains touristes étrangers et locaux qui devaient s’acquitter des droits d’entrée liés au statut particulier de l’île. L’ouest de Koh Samet est relativement préservé. Une seule baie, où quelques hôtels luxueux ont élu domicile, est accessible par les terres. Sur le littoral est de l’île, une route bitumée, le long de laquelle des petits bungalows, souvent en dur, ont été construits en amont, borde l’océan azur.

 

Les plages de sable blanc deviennent de plus en plus désertes à mesure que la route serpentant de baie en baie vers le sud. Elle révèle de beaux coins de baignade dans une mer par endroits translucide. Les hôtels ont toujours la permission d’installer des bars et des restaurants sur certaines plages, où la majorité des visiteurs se délectent de copieux plats de fruits de mer sur un fond de musique, avec parfois ici aussi des spectacles pyrotechniques impressionnants.

 

Certains bars dansants plutôt orientés vers une clientèle thaïlandaise jeune proposent des décors psychédéliques et des espaces d’expression artistique avec de la peinture fluorescente, et l’ambiance montant crescendo une fois les estomacs bien remplis, beaucoup s’amusent à se peinturlurer le visage et le corps en se déchaînant sur les airs à la mode.

 

Les plus aventureux louent un scooter – les pick-up verts ne vont pas forcément jusqu’au bout de l’île pour accéder aux plages les plus reculées en s’engageant sur les chemins en terre qui se dessinent à certains carrefours de la route bitumée. De petites criques désertes idéales pour sortir les masques et les tubas, là où d’impressionnants frontons rocheux s’avancent dans l’océan, séparant deux bouts de plage superbes. Ils sont peu à s’être donné rendez-vous pour le coucher de soleil à la pointe sudouest de l’île, où des aires scéniques ont été aménagées pour parquer les scooters.

 

Quelques hectomètres plus loin, la route mène à une impasse où un ultime point de vue au point le plus méridional de l’île donne sur l’horizon bleu cobalt du golfe de Thaïlande. Koh Samet a retrouvé un peu de calme, et la politique de nettoyage – au propre comme au figuré – opérée par la junte, contestée sur bien d’autres points, s’inscrit dans le nouveau paradigme du gouvernement militaire qui semble vouloir tirer le tourisme thaïlandais vers une clientèle plus sobre, plus organisée, plus huppée également, comme c’est déjà le cas ailleurs, à Pattaya ou à Phuket.

 

Une politique où la corruption se voudrait moins criante, moins visible en tous cas, qui peut dérouter ceux qui ont connu le royaume des années auparavant, mais qui permet sans aucun doute de mieux préserver ce petit paradis rapidement accessible depuis Bangkok.

 

Stéfan Legros (http://www.gavroche-thailande.com)

Article paru dans le dernier Gavroche, du mois de juillet 2018, disponible ici

 

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